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Des obligations de l’assureur dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur

Le 31 janvier 2013
Ordonnance de référé du Tribunal de grande instance de METZ en date du 03 juillet 2012

Un promoteur a entrepris la construction d’un ensemble immobilier, les immeubles ayant fait l’objet d’une vente par appartement selon acte de vente en l’état futur d’achèvement.

 

Or, des désordres sont apparus, consistant notamment en de nombreuses fissures et microfissures et en des infiltrations, de sorte que le syndicat des copropriétaires a saisi le Juge des référés de METZ d’une demande d’expertise, demande à laquelle il a été fait droit par ordonnance en date du 01er février 2011.

 

Les opérations d’expertise ont débuté et l’Expert a confirmé l’existence des désordres et notamment, la présence d’eau en fond de fosse d’ascenseur de l’un des bâtiments, ainsi qu’un glissement de terrain.

 

Or, le promoteur avait souscrit une assurance dommages ouvrage ainsi qu’une assurance responsabilité professionnelle des constructeurs non réalisateurs.

 

Une déclaration de sinistre a ainsi été régularisée en date du 11 août 2010 au titre de la présence d’eau en fond de fosse de l’ascenseur.

 

Suite à cette déclaration de sinistre, l’assureur a délégué un expert, le caractère décennal du sinistre n’ayant pas été contesté.

 

L’expert dommages-ouvrage a préconisé une reprise par cuvelage, travaux qui ont été réalisés et l’assureur a proposé une indemnité correspondant à la prise en charge de ces travaux à hauteur de 5 181,05 euros.

 

Cependant, le syndic de copropriété a informé l’assureur dommages-ouvrage qu’il ne pouvait accepter ce règlement dans la mesure où une facture complémentaire d’un montant de 533,83 euros avait dû être exposée.

 

Par courrier en date du 07 mars 2011, l’assureur a indiqué saisir à nouveau son expert.

 

Or, le syndic est resté sans nouvelles de l’assureur et ce malgré deux rappels en date des 08 et 19 septembre 2011.

 

Parallèlement, une seconde déclaration de sinistre a été adressée à l’assureur dommages-ouvrage en date du 29 juillet 2010, faisant état de l’existence de glissements de terrain.

 

L’assureur a cependant refusé de mobiliser ses garanties au motif que ce désordre affectait un ouvrage non compris dans l’assiette de la cotisation (coût de la construction sur lequel la cotisation dommages-ouvrage a été payée).

 

Dans le cadre de ses opérations d’expertise, l’Expert judiciaire a cependant confirmé que le talus à l’arrière du bâtiment avait été réalisé avec des pentes plus raides que celles préconisées par le géotechnicien et que compte tenu de l’absence de mise en œuvre d’un soutènement, des glissements du talus sont apparus et s’aggravent.

 

Il a ajouté que le talus était de fait instable et nécessitait des travaux urgents de stabilisation à court terme, estimés à la somme de 59 500,00 euros.

 

Ces travaux urgents n’ont cependant pas pu être réalisés, faute de financement.

 

En conséquence, le syndicat des copropriétaires a saisi une nouvelle fois le Juge des référés afin d’obtenir condamnation de l’assureur dommages-ouvrage au paiement d’une provision destinée à procéder efficacement aux travaux de reprise, ce dernier étant par ailleurs l’assureur constructeur non réalisateur décennal du promoteur.

 

Par ordonnance en date du 03 juillet 2012, il a été fait droit aux demandes du syndicat des copropriétaires.

 

Sur le premier point, à savoir la présence d’eau en fond de fosse, l’ordonnance a rappelé une jurisprudence constante selon laquelle dès lors que l’assureur n’a pas fait connaître sa position dans un délai de 90 jours à compter de la déclaration de sinistre, la garantie de l’assureur est définitivement acquise à l’assuré, conformément aux dispositions de l’article L. 242-1, alinéa 5, du Code des assurances, de sorte que l’assureur dommages-ouvrage a été condamné au paiement d’une somme de 5 714,88 euros.

 

En second lieu, concernant la garantie, l’ordonnance du 03 juillet 2012 a retenu que l’ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil n’est pas nécessairement un bâtiment et pouvait ainsi être un talus.

 

En l’espèce, les désordres affectent le talus en le rendant instable, même en l’absence de dommage matériel à l’immeuble, et mettent gravement en péril l’accès aux immeubles collectifs ainsi que la sécurité des occupants, de sorte qu’il est porté atteinte à la destination de l’ouvrage.

 

Les garanties d’un assureur sont mobilisables dès lors que le désordre affecte l’immeuble assuré et est dû aux modalités de construction de cet immeuble.

 

Le Juge des référés a enfin écarté toute contestation sérieuse dans la mesure où il est de jurisprudence constante que les locateurs d’ouvrage intervenus dans la construction sont tenus solidairement à l’égard du maître de l’ouvrage.

 

 

* * *

 

L’ordonnance du 03 juillet 2012 vient ainsi confirmer que l’assureur dommages-ouvrage doit être condamné à couvrir l’intégralité des désordres, dès lors qu’il n’a pas fait connaître sa décision dans les 90 jours de la déclaration de sinistre.

 

Le Juge des référés n’a pas eu à se prononcer sur l’application de l’assurance dommages-ouvrage car le constructeur était assuré en qualité de constructeur non réalisateur, soit au titre de la garantie décennale.

 

Enfin, il résulte de cette décision que le glissement d’un talus mettant en cause la sécurité des personnes constitue un désordre relevant de la garantie décennale.