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En l’espèce, le Tribunal de Grande Instance a, selon jugement en date du 25 février 2014, retenu que les demandeurs étaient bien les créanciers de la société T. pour un montant de 264 957,70 € TTC, correspondant au montant des travaux de finition, et ce d’après les calculs de l’Expert, la société T. ne justifiant pas avoir achevé la construction conformément aux actes de vente en l’état futur d’achèvement.
La créance des demandeurs était dès lors certaine en son principe.
En outre, le Tribunal a rappelé que la société T., après l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif en date du 29 septembre 2013, de sorte que l’insolvabilité de la société était démontrée.
Par ailleurs, le Tribunal a relevé que la société T. ne fournissait aucune explication sur les circonstances entourant la vente de la parcelle 249, et ne justifiait pas que le prix de vente ait été réellement versé, de sorte que la fraude était établie.
Par conséquent, le Tribunal a accueilli l’action paulienne des demandeurs et a prononcé l’inopposabilité de l’acte de vente de la parcelle 249 aux demandeurs aux motifs suivants :
« La sanction de l’action paulienne fondée sur l’article 1167 du Code civil n’est toutefois pas la nullité de l’acte telle que réclamée par les demandeurs, mais le constat de l’inopposabilité à leur égard de cet acte (…), autorisant le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d’une aliénation opérée en fraude de ses droits afin d’en faire éventuellement saisir l’objet entre les mains du tiers. L’effet de l’inopposabilité étant d’anéantir l’acte translatif mais uniquement à l’égard du créancier demandeur, ce dernier doit en effet pouvoir saisir le bien objet de l’acte passé en fraude de ses droits comme s’il n’avait jamais quitté le patrimoine du débiteur ».
Monsieur G. a cependant interjeté appel.
La Cour d’appel a, selon arrêt en date du 19 novembre 2015, confirmé les motivations et le jugement du 25 février 2014 du Tribunal de Grande Instance.
La Cour d’appel est néanmoins revenue sur la notion de collusion frauduleuse du tiers, soit, en l’espèce, de Monsieur G., laquelle n’avait pas été caractérisée par le tribunal.
Elle a retenu :
« La condition afférente à l’existence d’une fraude suppose, lorsqu’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le créancier qui exerce l’action paulienne prouve la complicité de fraude du tiers acquéreur ; toutefois cette fraude n’implique pas nécessairement l’intention de nuire, puisqu’il est de jurisprudence constante qu’elle résulte de la seule connaissance que le débiteur et son cocontractant à titre onéreux ont du préjudice causé au créancier par l’acte litigieux.
C’est à la date de l’acte par lequel le débiteur s’est dépouillé ou appauvri que les juges doivent se placer pour déterminer s’il y a eu fraude ou non, la preuve de la fraude pouvant être réalisée par tous moyens et les juges appréciant souverainement la réalité de l’intention frauduleuse ».
En l’espèce, les liens familiaux et sociétaires de Monsieur G. avec la société T. ainsi que la proximité des dates entre les opérations d’expertise au cours desquelles le représentant de la société T. faisait part de ses difficultés de trésorerie, et l’acte de vente ont conduit la Cour d’appel à retenir que Monsieur G. avait parfaitement conscience qu’en acquérant cette parcelle, il privait les acquéreurs des lots d’un gage pouvant leur garantir au moins pour partie le paiement de leurs créances au titre des travaux inachevés.
Dès lors, la collusion frauduleuse du tiers a également été caractérisée.
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L’action paulienne est ainsi un instrument de protection des créanciers contre les actes frauduleux de leur débiteur leur permettant de procéder à la saisie du bien comme s’il n’avait jamais quitté le patrimoine de leur débiteur.
En revanche, il convient de s’armer de patience car la procédure est longue.
En l’espèce, il convient d’observer que les opérations d’expertise ont débuté en 2010 et que l’arrêt de la Cour d’appel n’est intervenu qu’en 2015 étant précisé qu’à l’heure actuelle, les travaux ne sont toujours pas achevés.