La SCI M. a acquis un appartement moyennant un prix au m² de 739,13 €, soit pour une surface de 104 m², un total 76 869,52 € et a entrepris des travaux à hauteur de 39 029,00 €.
Que souhaitant vendre cet appartement, elle a, par commande en date du 29 juin 2006, chargé la SAS A. de procéder à l’établissement d’un état des surfaces conformément à la loi CARREZ.
Suite aux travaux réalisés, la SAS A. a établi une certification datée du 04 juillet 2006, mentionnant une partie privative d’habitation de 123,05 m² conformément à la loi CARREZ.
Le 15 septembre 2006, un compromis de vente a été signé, pour un montant de 190 000,00 €, la SCI M. déclarant aux vendeurs que l’appartement était de 123 m².
Cependant, les acquéreurs devant financer le bien au moyen d’un prêt en partie à taux 0 %, un nouvel expert s’est déplacé et a effectué un métré, parvenant à une surface de 109,50 m².
La SCI M. s’est trouvée alors contrainte de signer un avenant au compromis de vente prenant en considération les différences de surface et portant le prix de vente à la somme de 175 000,00 €.
Elle a alors saisi le Tribunal de grande instance de METZ d’une demande selon assignation en date des 07 et 12 décembre 2006 aux fins de voir condamner la SAS A. et son assureur, la compagnie C., sur le fondement de l’article 1134 du Code civil, à l’indemniser de son préjudice, sollicitant notamment 15 000,00 € correspondant au manque à gagner et 5 000,00 € au titre du retard pris dans le cadre de la régularisation de la vente, la SCI M. précisant que la vente devait intervenir initialement le 14 novembre 2006, mais qu’il n’aurait pas été possible de procéder à la régularisation de cet acte à cette date et ce, en raison de l’erreur commise par la SAS A.
Il s’avère que la SAS A. a été admise au bénéfice du redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de NANCY en date du 29 août 2006.
Par conclusions en date du 12 juin 2007, la SAS A. a fait savoir que la SCI M. n’avait pas déclaré sa créance au passif de la SAS A. auprès du liquidateur.
Or, l’article L. 622-24 du Code de commerce dispose que « À partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire » et ce, dans un délai de deux mois.
Si le créancier n’a pas déclaré sa créance dans ce délai, il dispose, conformément à l’article L. 622-26, d’un délai de six mois pour solliciter du Juge-commissaire qu’il le relève de la forclusion.
En l’espèce, ces deux délais étant écoulés sans que la SCI M. n’ait déclaré sa créance, la compagnie C. et la SAS A. ont conclu à l’irrecevabilité de la demande.
Sur le fond, la compagnie C. a rappelé que l’acte de vente par lequel la SCI M. a acquis le logement litigieux stipulait, au visa d’une attestation établie par un géomètre expert, que la superficie du lot concerné s’élevait à 104 m².
Elle a encore fait observer que la SCI M. avait réalisé une plus-value d’un montant de 60 660,00 € et en a conclu que cette dernière n’avait subi aucun préjudice mais au contraire avait, sur la vente d’un seul appartement, effectué une plus-value des plus confortables.
En outre, la diminution du prix de vente de 190 000,00 € à 175 000,00 € est également consécutive à un problème de conformité quant à la ventilation pour le WC individuel et pour la salle de bains.
Par jugement en date du 28 janvier 2010, le Tribunal de grande instance de METZ a rappelé que la forclusion établie par l’article L. 622-26 du Code de commerce constituait une fin de non-recevoir, susceptible d’être invoquée en tout état de cause.
De plus, lors de la commande passée à la SAS A., le 04 juillet 2006, la société était in bonis, le contrat ayant au surplus été exécuté avant que ne soit rendu le jugement d’admission au bénéfice du redressement judiciaire par le Tribunal de commerce de NANCY.
Le jugement a par ailleurs rappelé que la SCI M. avait mis en demeure la SAS A. de réparer les conséquences de sa faute par courrier du 25 octobre 2006, de sorte que la demanderesse avait à cette date, conscience de l’existence de sa créance et aurait pu effectuer ses déclarations de créances auprès du mandataire.
Ne l’ayant pas fait, le Tribunal de grande instance a déclaré la demande de la SCI M. irrecevable en tant que dirigée à l’encontre de la SAS A. et de la compagnie C, « l’irrecevabilité de cette seconde action devant entraîner celle de la première ».
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La SCI M. a interjeté appel de la décision du Tribunal de grande instance.
La Cour d’appel de METZ a rendu son arrêt le 19 mars 2013, infirmant le jugement entrepris au titre de la recevabilité de la demande en tant que dirigée à l’encontre de la compagnie C., mais d’autre part, sur le fond, a rejeté les prétentions de la SCI M.
En effet, la Cour d’appel a considéré en premier lieu que la SCI M. était recevable à agir à l’encontre de la compagnie C., assureur de la SAS A., sur le fondement de l’article L. 124-3 du Code des assurances, soit à se prévaloir du bénéfice de l’action directe à l’encontre de l’assureur, peu important que l’assuré ait fait l’objet d’une procédure collective, « La recevabilité de l’action directe ne [dépendant] ni de la mise en cause des organes de la procédure collective ni de la déclaration de créance ».
En second lieu, la Cour a rappelé que la liquidation judiciaire du chef de la SAS A. a été ouverte le 29 août 2006, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, laquelle a établi que le défaut de déclaration de créance était désormais sanctionné, non pas par l’extinction de la créance, mais par l’inopposabilité au débiteur et à la procédure collective, le créancier n’étant pas admis aux répartitions et dividendes.
La Cour a en conséquence réformé le jugement, considérant que la demande de la SCI M. à l’égard de la seule compagnie C. était recevable.
Cependant, sur le fond, la Cour a retenu que la SCI demanderesse ne pouvait relier à la faute reprochée à la SAS A. le préjudice dont elle entendait réclamer réparation, puisque le logement présentait un problème de conformité, de sorte que la réduction de 15 000,00 € ne s’expliquait pas exclusivement par la différence de superficie, mais tenait « avant tout aux normes d’habitabilité du logement ».
La Cour a également rappelé que la SCI M. avait réalisé une plus-value conséquente après travaux, chiffrée à la somme de 60 600,00 € et, enfin, que le retard dans la signature de la vente, de seulement 10 jours, « ne revêt pas l’importance que veut lui donner la société appelante ».
Elle en a conclu que la SCI M. ne rapportait pas la preuve d’un préjudice découlant directement de la faute imputable à la SAS A. et a débouté la SCI M. de l’ensemble de ses demandes.
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Il apparaît ainsi que l’action engagée à l’encontre de l’assureur d’une société en liquidation judiciaire n’est pas soumise à une quelconque formalité à l’égard de l’assuré ou de sa procédure collective.
Il convient toutefois de noter une incohérence dans l’arrêt du 19 mars 2013, dès lors que la Cour a reconnu que le défaut de déclaration de créance est, depuis la loi du 26 juillet 2005, sanctionné par l’inopposabilité au débiteur et à la procédure collective et non par l’extinction de la créance.
Or, la créance existant toujours, la Cour aurait dû déclarer l’action engagée à l’encontre de la SAS A. recevable et, au besoin, rappeler que le créancier ne pouvait être admis aux répartitions et dividendes antérieurs, ne pouvant participer qu’aux dividendes postérieurs.
L’arrêt de la Cour d’appel de METZ rappelle enfin que la démonstration d’une faute imputable à un tiers n’est pas suffisante pour engager la responsabilité civile de ce dernier.
En effet, pour obtenir indemnisation, il faut une faute, mais également un préjudice consécutif avec un lien de causalité.