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MARCHES PUBLICS DE TRAVAUX : LA RESPONSABILITE DU SOUS TRAITANT DE L'ENTEPRENEUR PRINCIPAL - Tribunal Administratif de STRASBOURG - 18 novembre 2010

Le 01 avril 2011
MARCHES PUBLICS DE TRAVAUX: Devant quel tribunal et sur quel fondement le maître de l’ouvrage ou son assureur doit-il rechercher la responsabilité du sous-traitant de l'entrepreneur principal?

 

Une commune a construit une maison d’accueil pour personnes âgées et a confié à une entreprise le lot gros œuvre, et à un architecte la maîtrise d’œuvre. La commune a parallèlement souscrit une assurance « Dommages-ouvrage ».

 

L’entreprise a sous traité le lot « carrelage-faïence » à une Société X.

 

Quelques années après la réception des travaux, des désordres sont intervenus : le carrelage mural de la cuisine s’est décollé. A la demande de la Commune, une expertise a été ordonnée par le Tribunal Administratif, tant contre l’assureur dommages-ouvrage que contre les constructeurs et sous-traitants.

 

La Commune a engagé une procédure devant les juridictions judiciaires contre l’assureur dommages-ouvrage, ainsi que, par la suite, une seconde procédure contre l’assureur dommages ouvrage devant les juridictions administratives.

 

L’assureur dommages ouvrage, qui a refusé de mobiliser ses garanties, a exercé son recours subrogatoire devant les juridictions administratives contre l’entrepreneur et le sous-traitant.

 

Le Tribunal administratif de STRASBOURG s’est déclaré incompétent pour connaître de l’action dirigée contre l’assureur du sous-traitant.

 

Concernant l’action dirigée contre le sous-traitant lui-même, le Tribunal administratif s’est conformé à la position du Tribunal des Conflits[1],laquelle a évolué :

 

I.   Le tribunal compétent en cas d’action dirigée par le maître d’ouvrage  public[2]contre un sous-traitant

 

 1. La compétence initiale de la juridiction judiciaire

 

Le Tribunal des Conflits, dans une décision du 18 juin 2007[3], se prononçait sur la compétence de la juridiction judiciaire lorsqu’une action en responsabilité quasi délictuelle était dirigée par le maître de l’ouvrage contre le sous-traitant d’un marché de travaux publics, et ce pour deux raisons :

                      1) Il n'existe aucun contrat entre le maître de l'ouvrage et le sous-traitant; 

                      2) L'action a pour seul fondement des fautes constituées d'éventuels manquements

                          du sous-traitant à ses obligations contractuelles.

 

 

 

                  2. L’évolution : la compétence de la juridiction administrative

 

 

Le Tribunal des Conflits a précisé, dans une décision du 02 juin 2008[4], que « le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux ressort à la compétence des juridictions de l’ordre administratif, sauf si les parties en cause sont liées par un contrat de droit privé ».

 

 1)     L’action formée contre l’assureur du sous-traitant

 

En conséquence, l’action formée par une commune contre l’assureur, qu’il s’agisse de l’assureur de l’entreprise titulaire du marché de travaux ou de l’assureur d’un sous-traitant titulaire d’un marché public de travaux relève des juridictions judiciaires.

 

 En effet, une telle action est relative à l’exécution d’un contrat de droit privé passé entre le sous-traitant et l’assureur.

 

 Le Tribunal administratif de STRASBOURG a fait application de ce principe[5], en précisant que l’obligation de l’assureur du sous-traitant de réparer le préjudice de la victime est une obligation de droit privé. En conséquence, l’action exercée contre cet assureur relève de la compétence des tribunaux de l’ordre judiciaire.

 

 2)     L’action formée contre le sous-traitant lui-même

 

En revanche, l’action en responsabilité fondée sur la garantie décennale formée par une commune contre un sous-traitant du titulaire du marché public relève de la compétence des juridictions de l’ordre administratif.

 

  Ø  Cette décision consacre le caractère dit « attractif » des travaux publics[6].

 

 

 2ème partie en ligne prochainement.

 

 

 



[1] Institué par la Constitution de 1848, supprimé puis réinstauré par une loi du 24 mai 1872, le Tribunal des Conflits, organe paritaire, a pour mission de résoudre les conflits de compétence entre les juridictions judiciaires et les juridictions administratives.

[2] Loi n°85-704 du 12 juillet 1985 (loi M.O.P.) : « Le maître d’ouvrage est la personne, mentionnée à l’article 1er, pour laquelle l’ouvrage est construit. Responsable principal de l’ouvrage, il remplit dans ce rôle une fonction d’intérêt général dont il ne peut se démettre ».

[3] Tribunal des Conflits, 18 juin 2007, Syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier 6, Place de la Gare à la VARENNE SAINT HILAIRE.

[4] Tribunal des Conflits, 02 juin 2008, Souscripteur des Lloyd’s de Londres / Commune de Dainville.

[5] Ce principe avait déjà été rappelé antérieurement par le Tribunal des Conflits : cf. T. Conflits, 04 mars 2002, Assurances Générales de France / Union des Assurances de Paris et autres.

[6] Sur ce point, il convient de rappeler que le contentieux des travaux publics relève des tribunaux administratifs de par la loi du 28 Pluviôse An 8 (17 février 1800).