Jugement du Tribunal Administratif de STRASBOURG du 4 juin 2013
La SCI T. a sollicité la délivrance d’un permis de construire aux fins de procéder à la construction de trois logements dans un immeuble collectif.
Le permis de construire lui a été délivré selon arrêté en date du 24 avril 2006.
La SCI T. a sollicité la délivrance d’un permis de construire modificatif, selon demande déposée le 13 mars 2009.
Sa demande est restée sans réponse, de sorte que par courrier du 15 juin 2009, la pétitionnaire s’est prévalue de l’obtention d’un permis de construire tacite.
Cependant, par courrier recommandé avec avis de réception en date du 17 juin 2009, le Maire a prétendu qu’une demande de pièces complémentaires, déposée dans la boîte aux lettres de la SCI T. le 13 avril 2009, serait restée sans suite.
La SCI T. a fait valoir qu’elle n’a jamais été destinataire de cette demande mais, les services compétents n’ont pas répondu.
C’est dans ces conditions que le Maire a, par courrier remis au pétitionnaire en date du 16 juillet 2009, rejeté la demande de permis de construire modificatif au motif de pièces ou indication manquantes pour instruire la demande.
La SCI T. a dès lors, après un recours gracieux resté infructueux, saisi le Tribunal Administratif d’une demande tendant à voir annuler l’arrêté du 16 juillet 2009.
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La SCI T. a, au soutien de ses prétentions, rappelé qu’aux termes de l’article R.423-23 du Code de l’urbanisme, le délai d’instruction pour les demandes de permis de construire ne concernant pas une maison individuelle est de trois mois et que l’expiration des délais d’instruction est de nature à rendre le demandeur titulaire d’un permis de construire tacite.
L’article R.423-19 du même code précise que le délai d’instruction court à compter de la réception en Mairie d’un dossier complet.
L’article R.423-22 dispose que le dossier est réputé complet si l’autorité compétente n’a pas, dans le délai d’un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur la liste des pièces manquantes.
Les articles R.423-38 et R.423-41 prévoient les formes que cette notification doit prendre.
Ainsi l’article R.423-38 précise :
« Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur (…) une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (…) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. »
L’article R423-41 dispose qu’ « une demande de production de pièces manquante notifiée après la fin du délai d’un mois prévu à l’article R423-38 n’a pas pour effet de modifier les délais d’instructions prévus aux articles R423-23 (…) ».
La SCI T. a également rappelé que le Conseil d’Etat estime qu’un demandeur est titulaire d’un permis de construire tacite s’il n’est pas établi qu’une lettre, reportant le délai primitivement fixé, lui ait été régulièrement notifiée (CE, 19 janvier 1983, n° 27615, Min. Env. et cadre de vie c/ Dehe), la preuve de la notification incombant à l’Administration (CE, 12 mars 1986, n° 49452, Gros-Flandre, JurisData n° 1986-040872).
Dès lors, en l’espèce, le délai d’instruction a commencé à courir le 13 mars 2009, jour du dépôt de la demande en Mairie.
La Mairie étant dans l’incapacité de justifier la notification du courrier du 13 avril 2009 qu’elle prétend avoir adressé au pétitionnaire aux fins de réclamer des pièces supplémentaires, la SCI T. soutient être titulaire d’un permis de construire tacite depuis le 13 juin 2009.
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Par ailleurs, la SCI T. a rappelé que la notification tardive du refus de permis de construire tacite vaut retrait de celui-ci (CE, 21 juill. 1992, Terronnes, n°100048, JurisData n° 1992-046242).
Or, selon la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’Administration (article 24), les décisions qui doivent être motivées nécessitent la production d’observations préalables de l’intéressé.
Le Conseil d’État a ainsi rappelé l’obligation pour le maire de mettre l’intéressé à même de présenter des observations écrites avant de rendre une décision de retrait de permis de construire (CE – Société Bouygues Immobilier – 23 avril 2003, req. n° 249712), le non-respect de cette formalité entraînant l’annulation de l’acte (CE – Caisse de décès – 12 juin 2002 – n°240741).
La SCI T. sollicite ainsi l’annulation de l’acte ayant irrégulièrement retiré le permis de construire tacite
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Le Tribunal administratif a, par jugement en date du 4 juin 2013, accueilli l’argumentation de la SCI T. et a retenu « que si le maire allègue qu’une demande de pièces complémentaires aurait été déposée dans la boîte aux lettres du pétitionnaire le 13 avril 2009, aucune preuve de ce dépôt n’est toutefois produite, la seule mention manuscrite figurant au verso du document présenté par la commune elle-même ne pouvant suffire à apporter la preuve de la notification avant l’expiration du délai au terme duquel le permis de construire devait être regardé comme ayant été tacitement délivré, la société requérante est fondée à soutenir qu’elle était titulaire d’un permis tacite et à regarder alors l’arrêté du maire portant refus de permis de construire comme une décision de retrait du permis implicitement accordé ».
Par ailleurs, il a retenu que la décision de retrait n’ayant pas été précédée d’une procédure contradictoire conformément à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, celle-ci a été prise au terme d’une procédure irrégulière et doit pas conséquent être annulée.
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Ce jugement, s’inscrivant dans le cadre d’une jurisprudence constante, nous rappelle que les demandes de permis de construire sont soumises à un formalisme qui s’applique tant au pétitionnaire qu’à l’Administration.
Il appartient ainsi à celle-ci de justifier de la notification des courriers envoyés au pétitionnaire, un simple dépôt dans une boîte aux lettres ne pouvant pas valoir comme une notification régulière.